« Tu me passes les pommes de terre Max s’il te plait. » Alex tendait le bras pour attraper le plat lorsque leur diner dominical en famille se transforma en pugilat. « J’ai couché avec Asher le soir de mon anniversaire. » Autour de la tablée, le silence le plus total se fit alors qu’Alexis levait les yeux vers sa sœur. Cette dernière évitait avec attention son regard ce qui lui suffit pour comprendre que ce n’était pas une blague stupide. Son bras resta suspendu un moment en l’air, comme si elle s’était mise sur pause. La tension était palpable, la gêne avait conquis chaque convive et il ne leur fallut qu’un mouvement de sa part pour que tout s’emballe. Alexis ramena son bras sur la table et la cacophonie commença. Tout le monde se mit à parler à tors et à travers mais pour Alex ce n’était qu’un bruit de fond diffus sans vague importance. Elle avait l’impression que son monde tournait au ralenti, qu’il lui fallut plusieurs minutes pour se tourner vers Asher qui était assis près d’elle. Cela dura seulement une seconde. Peut-être deux. Mais son cœur eut le temps de se briser. Toute une vie pour elle. Il avait couché avec sa sœur. Il avait couché avec sa sœur. L’information avait eut du mal à se frayer un chemin en elle tant cette idée paraissait irréelle. Improbable. Et pourtant. Il fallut qu’elle batte des cils plusieurs fois pour réussir à le distinguer ce qui lui fit comprendre qu’elle pleurait. Il posa une main sur la sienne qu’elle retira immédiatement. « Alex. » Cette dernière secoua la tête sans discontinuité. Elle ne voulait pas l’entendre. Elle n’arrivait pas même à le regarder en face. Lorsqu’il s’approcha d’elle, la brune recula violemment et sa chaise s’écrasa au sol dans un grand fracas. Le silence se fit de nouveau comme s’ils avaient tous répétés et que c’était une sorte de signal. « Alexis, je suis vraiment désolée, c’était. » « Tais-toi. » Elle arrêta sa sœur sans même la regarder. Elle ne voulait pas l’entendre non plus. Elle voulait la frapper, la frapper jusqu’à ce qu’elle souffre autant qu’elle. Jusqu’à ce qu’elle demande grâce. « C’était une seule. » « J’ai dit, tais-toi. » Sa voix n’amenait aucune discussion. Malgré ses larmes elle était étonnement claire, brutale. Sans aucune trace du chagrin qui la consumait. « Ça ne voulait rien dire. » Lentement, intégrant les paroles de Joey. « Tu étais au courant ? » La culpabilité ombra les yeux de sa cadette et elle comprit qu’effectivement cette dernière était au courant. En tournant la tête vers les autres, elle comprit qu’elles l’étaient toutes. Elles savaient toutes et aucunes ne le lui avait dit. « Oh mon dieu. » Les débris de son cœur se décomposèrent en poussière en réalisant ce que cela voulait dire. Elle leur parlait mariage depuis presque un mois. Elle leur parlait d’Asher comme de l’homme de sa vie. Et tous les cadeaux qu’il lui avait offerts récemment lui revinrent en mémoire. Elle était stupide. Réellement stupide. Elle n’avait rien soupçonné alors qu’elle savait qu’en cas de tromperie les hommes ont tendances à gâter leurs petites-amies. Sans plus y réfléchir elle arracha le collier qu’elle portait et le jeta sur Asher, accueillant la douleur physique avec plaisir. « Alexis. » Fusillant Asher du regard, elle lui déclama le plus calmement possible de toute sa fureur sous-jacente. « Je ne veux plus, jamais te revoir. » Il allait ouvrir la bouche pour protester, s’était déjà levé mais elle l’arrêta en levant l’index vers lui et secouant la tête. « Jamais. » Elle lisait la douleur dans ses yeux mais il n’y avait pas la place pour l’empathie en elle. Sans attendre elle tourna les talons et quitta la maison de son ainée sans se retourner une seule fois. Alex se trouvait à plus d’une demi heure de chez Robin lorsqu’elle se rendit compte qu’elle avait prit le volant. C’était un miracle qu’elle soit toujours vivante, elle se souvenait du voyage comme d’un rêve un peu flou. Ses larmes avaient séchés sur ses joues et elle se gara sur le bord de la route sans attendre. Son cœur battait vite, trop vite. Elle observa les voitures passer pendant un long moment sans esquisser le moindre geste. La vie continuait. Le monde n’avait pas arrêté de tourner parce que sa pauvre petite vie venait d’être chamboulée. Il n’y avait qu’elle. Qu’elle qui souffrait le martyr.