Que dire de ma vie ? A vrai dire elle a été plutôt chaotique avant aujourd’hui, enfin il y a quelque temps. Je suis née à Saint-Louis il y a maintenant 26 ans, d’une famille plutôt pauvre, j’ai un frère, qui est sur protecteur d’ailleurs et qui a mis du temps à faire sa vie de son côté. Je dis ça sur un ton sarcastique mais au fond je l’ai toujours aimé, j’ai adoré qu’il soit à mes côtés toutes ces années, je l’admire, je l’idole presque, oui comme toutes les petites filles mon frère était celui qui me protégeait de tout, celui sur qui je pouvais compter. Mes parents sont des parents normaux, ceux qu’on envoie chier lorsqu’on joue les rebelles à l’adolescence. Mon père est restaurateur et ma mère est libraire, un couple explosif qui s’est toujours aimé. C’est d’ailleurs peut-être pour ça que l’on me traitait de niaise plus jeune, parce que je les regardais avec mes yeux émerveillés, souhaitant rencontrer le prince charmant, fonder une famille et être heureuse comme eux à ce moment précis. Mon passé n’a rien d’important vous savez, il est banal, il a ses moments de joie, et ses moments de peine, ceux qu’on cache, ceux qu’on raye volontiers sur le tableau de larmoiement. Plus petite je voulais être pâtissière, ou encore danseuse, manque de pot je ne suis douée pour aucun des deux. Je suis capable de faire cramer un cake et de me prendre les pieds dans le tapis dès que j’essaie de faire quelques pas, parfois les deux en même temps. Alors je me suis orientée vers ce que je savais faire, organiser des soirées. Oui j’ai toujours été la fille qui dirige tout d'A à Z, histoire que la soirée se passe bien, celle qui au final passe sa soirée à courir après les autres pour qu'ils ne posent pas leur bière sur la table en verre, bon Dieu ça existe les dessous-de-table. Mais faisons un bond en avant voulez-vous ? Abandonnons mes études studieuses pour vous parler de ce qui ‘gouverne la vie’ d’après plusieurs grands écrivains. Lors de l’adolescence j’ai eu quelques petits copains, juste pour se donner genre devant les copines, seulement jamais au grand jamais je n’ai succombé, jusqu’au jour où malheureusement mon regard a croisé celui de Swayer, je dois vous avouer qu’encore aujourd’hui ce prénom me donne des frissons et les larmes perlent mes yeux. Je suis tout de suite tombée amoureuse de cet homme, de cette romance, c’était presque comme dans un livre. Il était beau, grand, presque intouchable, et moi j’étais la petite princesse qui se blottissait dans ses bras dès qu’elle avait froid. Notre couple faisait envier ceux qui étaient seuls et je dois avouer que même si ce n’est pas mon genre j’aimais ça. J’étais très jeune, peut-être un peu trop pour connaitre la force de tels sentiments. Je voulais tout et tout de suite, vous savez, la grande maison, le chien, et surtout les enfants. Si j’avais su… Je ne me serai peut-être pas lancée à corps perdu dans cette relation, sachant pertinemment comment celle-ci m’a fait souffrir ensuite. Mon frère n’approuvait pas cette relation, et je me doutais de la chose, au fond Sawyer est un loup solitaire, quelqu’un d’un peu froid, loin du papa romantique que je décris à longueur de temps. Mon frère a toujours su que quelque part, Saw’ allait m’abandonner un jour ou l’autre, il n’avait pas tort même si au fond ce n’était pas de sa faute. Le drame a été que je tombe enceinte. Je revois encore la scène, celle où je dégueule à longueur de journée, où la thèse de l’intoxication alimentaire est écartée, j’avais alors décidé de faire un test qui s’était révélé positif. Je me retrouvais là-, assise sur le sol froid de la salle de bain à contempler le petit bout de machin sur lequel j’avais fait pipi, les larmes coulant le long de mon visage. Je ne voulais pas, j’étais trop jeune, pas ça, pas moi. C’est à ce moment-là que Sawyer a décidé d’entrer et de me consoler, pourquoi fallait-il qu’il débarque toujours au mauvais moment ? Je ne lui en ai pas parlé tout de suite, j’ai attendu, encore et encore, clouée au lit, prétextant être malade, en réalité j’étais déprimée et je ne cessais de cogiter sur le sort de l’être qui allait grandir dans mon ventre. J’ai fini par lui dire, et par lui avouer ma décision, celle de le garder, parce que je l’aimais, et parce que je voulais fonder une famille. Au départ Sawyer était plutôt réticent, mais lorsqu’on lui posa le bébé dans les bras, un sourire s’était dessiné sur son visage. Malheureusement le bonheur ne fut que de courte durée, parce que mon cher petit ami a décidé par la suite de s’engager à l’armée, un coup de tête sans doute. Je lui ai pourtant crié dessus, le suppliant de rester, pour moi, et pour notre fils Justin, mais il n’en fit qu’à sa tête, nous laissant sur le tarmac moi et son bébé qui n’avait même pas deux ans. J’ai pleuré toutes les larmes de mon corps, encore et encore, tout ça en espérant qu’il revienne, en attendant une nouvelle qui n’arrivera jamais. Alors j’ai fait mon petit bout de chemin de mère seule, m’occupant du mieux que je pouvais de mon fils qui s’est montré plus qu’adorable. Les moments où il me parlait de son père me serraient le cœur mais je me contentais de lui parler de ses bons côtés, arborant un large sourire, après tout, que pouvais-je dire d’autre ? Les mois passèrent, et je restais renfermée sur moi-même, attendant qu’il revienne, me sacrifiant pour mon fils. J’oubliais d’aller faire du shopping, d’aller chez le coiffeur, je ne me sentais même plus féminine. Ma mère essayait tant bien que mal de m’aider mais ses bras n’arrivaient pas à me consoler. Mes amies me forçaient alors à sortir, s’occupant de Justin au moins un temps. Et c’est alors qu’une habitude s’installa chez moi, chaque midi j’allais dans un petit café du coin boire ce qu’il avait de mieux, goutant aux muffins, soufflant, c’était mon petit moment de la journée. Et c’est là que ma vie bascula une nouvelle fois. Inconnu, tel était son nom auparavant. Cet homme si penaud paumé parmi ses plans, cet homme pourtant charmant, qui me toisait du regard dès que je franchissais la porte du café, déclenchant les petites sonnettes. Je le trouvais charmant certes, mais je ne pouvais rien faire, j’étais bloquée, j’attendais que Sawyer revienne, et pourtant mon côté féminin me criait de courir vers lui, de pousser ses plans et de me planter devant lui. Les jours passèrent et je sentais son regard sur moi toujours plus insistant. J’en parlais à ma confidente, ma meilleure amie depuis toujours et le verdict tomba ; il fallait que je refasse ma vie, que je passe à autre chose, et c’est ce que je fis. J’avais alors pris mon courage à deux mains et je lui avais adressé la parole, lui proposant qu’il m’invite, et a ma grande surprise, c’est ce qu’il fit sans tarder. Pour une fois, je suis restée un long moment dans le café, en sa compagnie, à parler de tout et de rien, à rire d’idioties, après tout, voilà bien longtemps que je n’avais pas parlé de quoi que ce soit, que je ne m’étais pas confiée. À la fermeture, je me suis mise à rougir, me disant qu’il devait me prendre pour une folle, mais il n’en était rien puisqu’il m’invita le jour suivant, puis l’autre, et encore l’autre. Voilà comment a débuté mon histoire avec Adam, ce fou dont je suis terriblement amoureuse. Au bout de quelques mois de relation seulement, je lui annonçais que j’avais un fils, par peur qu’il ne s’en aille, je me suis mise à pleurer, pensant mon cœur déchiré une nouvelle fois, mais à ma grande surprise il resta, et s’efforça d’être un bon père pour Justin, mon amour n’en étant que plus décuplé. Voilà maintenant plus d’un an que nous sommes fiancés, c’est bête mais dès que je repense à ce moment j’ai les larmes aux yeux, des larmes de bonheur bien évidemment. Même si mon fils est un peu réticent à cette union, mon frère est plus que content, il faut bien quelqu’un de mécontent, sinon ce ne serait pas drôle. Il y a environ quatre mois, alors que je regardais les napperons éventuels pour ma cérémonie, j’ai eu comme un pressentiment, et les yeux ronds je courais à la pharmacie acheter un test qui allait me révéler une seconde grossesse. La vie me tendait les bras, Adam allait être un père aimant, ma famille allait enfin être au complet, nous allions vivre heureux et... Oh mais l’histoire ne serait pas drôle si elle n’avait pas un élément perturbateur, élément nommé Sawyer, qui a miraculeusement survécu, et qui est revenu parmi nous, me chamboulant de nouveau. La tête ailleurs, le cœur embué, je ne sais que faire, je suis partagée, non plutôt déchirée… Voilà où j’en suis. A vrai dire je m’en sors plutôt bien, je pense que je devrais écrire un livre, qui sait, peut-être qu’un jour une série sortira sur moi, du genre ‘Marley the new desperate housewife’, je suis sure que cela ferait un carton.